Le rock national : histoire d’une particularité argentine

Par Mélodie Vanesse

 

Alors que le tango est sans conteste la musique argentine la plus connue à travers le monde, le rock ’n’roll tient lui aussi une place spéciale dans le cœur des locaux. Son histoire et son évolution au fil des générations en font l’une des musiques les plus populaires du pays.

En Argentine, on parle d’ailleurs de rock national, un mouvement musical en marge du rock européen ou nord-américain. Il constitue ici une vraie singularité, un OVNI dans le paysage musical latino-américain.

Retour sur 60 ans de musique rock en Argentine, de 1956 à nos jours.

 

De 1956 à 1970 : la naissance du rock national

C’est avec Eddie Pequenino et son groupe Mr. Roll and the rockers que le rock ’n’roll débarque pour la première fois en Argentine, sous l’influence du rock uruguayen, mexicain, mais avant tout anglo-saxon. Le genre est alors peu familier aux Argentins dont la plupart ne connaissent qu’Elvis Presley, alors au début de sa carrière musicale.

C’est un an plus tard qu’apparait le premier groupe de rock ’n’roll argentin à chanter en espagnol, Los Big Rocker’s. Le groupe ne connaît qu’un succès mitigé et c’est avec l’arrivée du groupe Los Gatos Salvajes au début des années 1960 que le genre musical commence à gagner en popularité.

Le succès est quasiment immédiat. En 1967, le groupe atteint son apogée avec la sortie de son tube La Balsa, vendu à environ 250 000 exemplaires dans le pays.

Les années 1960 marquent un tournant décisif dans l’émergence du rock national. C’est à Buenos Aires que tout se passe, particulièrement au café-concert jazz-rock de La Cueva où les pionniers du rock argentin se produisent et se retrouvent régulièrement en début de soirée. S’ensuivent des fins de soirées à La perla de Once, un bar-discothèque de Buenos Aires qui devient un site d’intérêt culturel en 1994.

A partir du coup d’état militaire qui renverse Arturo Illia en 1966, ces deux lieux emblématiques du rock national argentin sont interdits par les autorités. La musique devient alors un nouveau moyen de s’engager et d’organiser la rébellion contre le nouveau pouvoir en place. Le rock se fait plus rythmé, plus critique et plus engagé que jamais. Un mouvement qui ne cessera de s’amplifier les années suivantes, notamment avec la sortie des premiers magazines de rock et l’organisation des premiers festivals à la fin des années 1960.

 

De 1976 à 1983 : le rock national sous la dictature

Un coup d’État militaire chasse Isabel Perón du pouvoir au printemps 1976. Le rock est dès lors considéré comme une menace par les nouveaux dirigeants. Alors qu’un climat de terreur s’installe sur toute l’Argentine, de nombreux artistes et certains des plus grands groupes de rock de l’époque décident de s’exiler. D’autres, au contraire, prennent la décision de résister face à la menace. L’époque voit apparaître de grands talents à l’instar de Luis Alberto Spinetta ou de Charly García et son groupe Sui Generis.

Malgré la disparition de nombreux groupes, le rock national argentin prend de l’ampleur. Beaucoup de jeunes en quête de liberté adhèrent en effet aux paroles engagées des différents groupes. Au début de l’année 1982, le climat s’apaise enfin et la plupart des grands groupes argentins reviennent au pays. Cette période marquera l’âge d’or du rock national en Argentine.

 

De 1983 à 2000 : l’âge d’or du rock national argentin

La dictature prend fin en 1983 et l’émergence de la démocratie entraîne une véritable explosion du rock national. Les groupes et les chansons autrefois interdits peuvent maintenant exister au grand jour et le rock national devient un symbole de démocratie et de liberté. C’est à ce moment qu’arrivent sur scène des groupes emblématiques comme Los Fabulosos Cadillacs ou Soda Stereo, considéré encore aujourd’hui comme le plus grand groupe de l’histoire du rock hispanophone.

Le début des années 1990 marque les prémices de la diversification du rock argentin avec l’émergence de nouveaux groupes aux influences diverses. La pop gagne petit à petit du terrain alors que surgissent le punk et le heavy metal. Des groupes comme A.N.I.M.A.L et Hermética voient le jour, créant un rock d’un nouveau genre en mélangeant le trash, le heavy metal et le hardcore punk.

A la fin des années 1990, le rock migre une nouvelle fois vers un style différent avec l’émergence du rock indie.

 

Le rock argentin aujourd’hui

On sent encore aujourd’hui toute l’influence des groupes du moment sur l’histoire du rock argentin : Los Shakers et Los Gatos Salvajes dans les années 1960, Moris et Sui Generis dans les années 1970, Spinetta Jade et Punch dans les années 1980… Tous ont laissé leur empreinte sur le rock actuel et certains même comme Litto Nebbia, Spinetta ou encore Charly Garcia ont grandement marqué le genre, de ses débuts dans les années 1960 jusqu’aux années 2000.

Le rock national argentin se divise aujourd’hui en plusieurs sous-genres étroitement liés à l’histoire politique et culturelle du pays :

le rock progressif avec The Pied Piper et De Rien
le rock indie avec Mataplantas
le rock punk avec Cadena et Bulldog
le heavy metal avec Rata Blanca et Horcas
le rock fusion avec Bersuit Vergarabat

Le rock argentin tient une place à part entière dans le patrimoine culturel du pays. On le découvre dans les bars, les clubs et les salles de concert de Buenos Aires ainsi qu’à l’occasion des nombreux festivals organisés régulièrement sur le territoire.

Le plus important d’entre eux, le Cosquín Rock Festival, est organisé dans la province de Córdoba et représente l’occasion idéale de découvrir certaines des plus grandes figures du rock national argentin actuel comme Los Gardelitos et Jóvenes Pordioseros.

 

Quelques-uns des grands succès indémodables du rock national argentin

Pour encore plus de musique argentine, montez le son et écoutez la playlist des chansons préférées de l’équipe Terra Argentina !